Quitter Paris, ça fait peur à bon nombre de mes amis. Et j’ai dû prendre le temps de la réflexion aussi. Quitter Paris après 14 ans dans la capitale, c’est vraiment un bond dans l’inconnu, un saut dans le vide.
Mais après avoir pesé le pour et le contre, il était temps de déménager de Paris. Les 5 raisons qui suivent sont très personnelles, mais j’avais envie de partager avec vous ce cheminement.
Si vous vous demandez vous aussi ce que vous faites encore à Paris, ça apportera peut-être de l’eau à votre moulin. Si vous êtes un Parisien pur jus, attention, ce que je raconte dans les lignes qui suivent peut vous sembler lunaire.
1/ Le bruit et l’odeur, comme disait Jacques…
Mais surtout le bruit. L’odeur de pisse et d’ordures, l’odeur du métro et des dessous de bras mal lavés, on s’habitue. Vraiment. Pour qui a côtoyé la ligne 13 de manière très régulière, les odeurs c’est un vrai souci.
Encore plus quand on a le nez assez fin et qu’on aime bien l’histoire du parfum, les bons parfums masculins etc…
Donc à la rigueur, le métro dans Paris pue, mais on ne passe pas sa vie dans le métro.
Le vrai souci pour moi, c’est devenu le bruit.
Permanent, agressif, douloureux.
Et ça ne s’est malheureusement pas arrangé au fil des ans. C’est même devenu pire avec le confinement. Je vous ai déjà parlé de ma misophonie. (Et j’en reparlerai, je suis en train de lire un livre sur le sujet). En un mot : le bruit des gens me rend fou.
Le bruit des voisins : ma source principale de rage au quotidien
Mon voisin bruyant et alcoolique. Faut que je vous raconte comment il mettait sa compagne / une de ses compagnes dehors à 3 heures du matin, et qu’elle le traitait de connard impuissant. Avant qu’elle ne s’endorme sur son paillasson. On avait de bons rapports au début, mais les portes qui claquent à répétition au milieu de la nuit ont eu raison de ma tolérance.
Je vous parle de mes voisins du dessus, les éléphants ? Ils possèdent un IMC tout à fait correct, mais sont si lourds. Ils marchent sur les talons, surtout entre 23 heures et 00 :30. Tous les soirs, j’ai l’impression que les gars déménagent. Je n’ai plus l’âge de me coucher aussi tard. Ils ont donc reçu de nombreux textos de ma part (parfois, je privilégie le texto, voire point suivant…) Parfois, c’était eux. Mais la plupart du temps, il s’agissait de locations Airbnb (donc plutôt des jeunes qui venaient faire la fête sans se soucier des voisins. Un délice.)
Mes voisins du dessous ? Vous les connaissez ? Probablement des jeunes sortis d’école de commerce (donc oui, je les comprends, le monde est à nous…) Le souci, c’est que leur salon était sous ma chambre. Et que je suis descendu plus d’une fois leur demander gentiment de baisser le son. Un soir, ivre, l’un d’entre eux s’est mis à hurler Wonderwall de Oasis à 00 :30. Je suis donc descendu, j’ai frappé à la porte gentiment. Le gars est venu derrière le judas, m’a regardé, et n’a pas ouvert. En matière de savoir-vivre, je crois qu’on était au maximum de l’incivilité. J’ai donc appelé la police, qui trente minutes plus tard tambourinait dans la porte du chanteur aviné. Il a ouvert, incrédule, et a payé sa contravention. Je ne l’ai plus entendu par la suite. C’est quand même fou de devoir en arriver là… En plus j’aime beaucoup les frères Gallagher, mais là, le massacre est allé trop loin.
J’ai été élevé dans le respect de l’autre. Avec ce principe de vie : « Ma liberté s’arrête là où commence celle des autres. »
A Paris, les agressions et atteintes à mon espace auditif étaient quotidiennes, et je ne voulais plus me coucher avec la boule au ventre. Malgré les séances de méditation, malgré les sessions de musique relaxante, tous les soirs je me couchais en sachant que j’allais devoir me relever pour demander à un des soixante voisins de faire moins de bruit. Epuisant. Pas tenable sur le long terme.
2/ Le Xème arrondissement de Paris, une raison à part entière de quitter Paris
J’ai passé à peine un an dans cet arrondissement tout pourri. Je n’ai pas eu le temps de le connaître vraiment, de l’explorer. Merci à Da Graziella la meilleure pizzeria du quartier. A Libertino aussi. A quelques très bons restos qui ont rendu le 10ème arrondissement supportable pendant le confinement.
Mais précédemment, j’avais vécu dans le 6, le 7, le 8, le 17 et le 9ème pendant très longtemps.
Passer de l’Opéra et de la rue des Martyrs à la saleté et la drogue en libre-service du Xème arrondissement, ce n’était pas ce que je voulais.
Trottoirs trop petits pour la poussette, misère et mendicité, la rue du Faubourg saint Denis, c’est la cour des miracles.
Et les dealers à l’entrée du parc, musique à fond, alcool et transactions au vu et au su de tous… C’est trop pour le fils de gendarme que je suis.
Pourtant, il y a de beaux endroits dans le 10ème : la médiathèque Françoise Sagan, le canal. Pourtant le dixième arrondissement possède son lot de bobos, de bureaux de production ciné, d’espaces de coworking et de bonnes boulangeries et brunchs (Ten Bells, Mamiche, Liberté, merci !).
Mais la Gare du Nord aussi. Et le parc squatté par les toxicos où tu n’as pas envie de faire ta promenade en poussette.
J’allais presque oublier la lassitude des samedis volés : entre les Gilets Jaunes pendant un an, puis la grève de la RATP en décembre 2019 – janvier 2020, puis l’enchaînement des manifestations qui bloquaient l’accès à République… Le Xème et moi, c’est la mauvaise rencontre au mauvais moment.
Vu mon profil vieillissant, j’aurais dû retourner dans le 17ème ou le 16ème… Ce qui me mène au point suivant…
3/ Mon grand âge et mes aspirations à plus d’espace
Avez-vous vu cette étude lors du premier confinement ? Les statistiques sur les conditions de vie des Français ? Avec les 3 équipes : l’équipe des Français avec jardin, l’équipe des Français avec balcon, et l’équipe des Français confinés avec fenêtre.
Je me suis demandé, en regardant le ventre rond de ma femme : « Mais est-ce que t’es un con ? Est-ce que ça t’amuse d’être comme un lapin dans une cage ? Sans même un balcon ? Tu as les moyens de vivre dans une maison. Tu as 36 ans, pas loin de la moitié d’une vie. Ce ne serait pas le moment d’arrêter de lâcher 1800€ de loyer par mois à des inconnus ? »
C’est un call avec un web-entrepreneur d’élite qui m’a convaincu. Il m’a dit « Mais faut vraiment être con ou né à Paris pour croire que Paris t’apporte quoi que ce soit à l’époque du web ».
J’ai fait les calculs. En 14 ans de vie à Paris, j’ai gaspillé plus de 140.000€ en loyers. 140.000€, ça aurait fait un sacré bel apport pour m’acheter une maison, non ?
(La réponse est donc « oui Sélim, tu es un petit peu con, mais c’est bien de t’en rendre compte maintenant que tu es papa et d’essayer d’améliorer tes conditions de vie »).
4/ Le Covid, la Covid, le truc qui a tué ma vie sociale
Salut, je vous ai dit que je vivais avec une hypocondriaque ? Avant, nous étions dehors entre 3 et 4 soirs par semaine. Soit nous allions voir des amis, soit nous dînions dehors avec des amis, soit nous les accueillions chez nous.
Mais nous avons fait le choix de ne plus voir personne pendant les confinements et pendant la pandémie de Covid-19. (cf madame est hypocondriaque).
J’ai reçu un message en ligne de quelqu’un qui se faisait du souci pour moi, me disant « d’aller voir un psy, que je ne pouvais pas vivre comme ça ». J’ai des amis qui m’ont appelé pour me dire que « franchement, le COVID tu en chies pendant 10 jours, mais ça passe. »
Alors autant je prends le risque (modéré) de déménager sur un coup de tête (c’est réversible), autant je ne vais pas tenter le diable sur cette « grippe ». Pour cause : je suis asthmatique, et hmmmm après réflexion, l’intubation, ça me tente moyennement.
J’ai été élevé avec des films de guerre en permanence (pas une fois par semaine, mais presque un par jour), donc j’ai grandi avec cette idée de sacrifices à faire au bon moment.
Serrer les dents, je sais faire : j’ai fait deux ans de prépa en internat, sans sortir vraiment, sans vie culturelle. Donc deux ans de Covid, ça va aller (j’ai rapidement expliqué à ma femme qu’on allait vivre ainsi jusqu’à septembre-décembre 2021 dès le début de la pandémie).
J’ai aussi grandi avec l’idée de comparaison avec nos grands-parents ou arrière-grands-parents privés de vie sociale pendant 3-4 ans lors des deux guerres mondiales.
Deux ans de ma vie, privé de mes amis, avec la bibliothèque que j’ai, avec Whatsapp et les coups de fil aux amis, ça va aller. Mes vrais amis, je leur parle. Tout va bien. Ils me manquent, mais ils sont toujours là.
Et on reprendra la conversation là où on l’avait laissée, sans jugement de leur part, ni de la mienne. En attendant, quitte à ne voir personne, autant lire dans un jardin et aller courir dans la forêt.
(Enfin, quand je dis « personne » : si vous faites un test PCR, on peut se voir, pas de souci, je serais ravi de vous accueillir !)
Raison 5 : Bienvenue au monde ma fille
La vraie raison de mon départ de Paris : je suis devenu papa et j’adore ça. Ça fait presque un an que ma fille est venue au monde et elle a bouleversé ma vie… et mon organisation professionnelle.
Comprendre : niveau productivité, je ne suis clairement plus la brute que j’étais à 25 ans. Pendant les 8 premiers mois de la vie de ma fille, de juin 2020 à février 2021, c’était un miracle si j’arrivais à travailler 2 à 3 heures par jour.
Ça ne m’a pas empêché de signer de nouveaux clients ni de sortir un livre sur le copywriting, mais le fait de ne pas trouver de crèche ni de nourrice fiable pour Alma a ralenti mon business.
(J’ai dû me séparer de 3 nounous : la première a failli ébouillanter Alma avec un biberon à 100 degrés. Je l’ai renvoyée immédiatement, la confiance était rompue.
La seconde a cru que nounou voulait dire « laisser ma fille dans son transat et passer sa journée sur Snapchat ». Inconciliable avec mes exigences de papa qui veut éveiller sa fille.
La troisième a essayé, mais elle devait garder deux enfants en même temps : c’est très compliqué, et on ne peut pas lui en vouloir d’avoir été débordée.)
Alors avec la maman d’Alma, on s’est dit que quitter Paris pour offrir quelques années paisibles, loin du tumulte de la capitale à notre fille, serait une bonne idée.
Nous espérons lui donner ce que nous avons eu la chance de connaître nous aussi : une enfance dehors, au grand air.
Elle aura le temps de revenir à Paris, sa ville de naissance, pour la compétition scolaire, pour les concerts, pour la vie nocturne, sociale et culturelle.
En attendant, à elle les grands espaces.
Ici, les bruits seront ceux des oiseaux le matin, et pas des mouettes du canal Saint Martin, des tronçonneuses et des tondeuses à gazon.
Nous n’irons plus au Carrefour Bio du 6 rue de Paradis, mais à la ferme qui vend les légumes bio cultivés dans le champ situé à un jet de pierre.
Nous ne croiserons plus Woodkid ou Angèle en allant prendre un café au Hoxton, ni Ramzy, FX Demaison, Lacrim, Ichon au détour d’une boutique, ou Jonathan Cohen en trottinette rue de Paradis.
Ce n’est pas grave. Ces anecdotes amusantes seront remplacées par la présence de la famille proche, qui couvre d’amour notre enfant.
Paris, on se reverra. Dans 5 ans, dans 10 ans, ou peut-être avant.
Au fond, j’aime prendre des décisions sur des coups de tête. Et aller de l’avant. Ce que je ne supporte pas, c’est l’attente. L’indécision. L’incertitude.
La seule certitude que j’ai : c’est que je suis avec la bonne personne pour me lancer dans de telles aventures.
J’ai beaucoup trop d’amis qui se demandent s’ils doivent quitter Paris. Quand le faire ? Et qui souffrent de cet entre-deux. Je pense qu’on n’est jamais vraiment prêt. Il faut juste trouver une ou deux bonnes raisons de quitter Paris, et avoir un plan pour s’intégrer dans la ville de destination.
Ça, on en parlera plus tard. Est-ce que je me plais ici pour le moment ? J’ai surtout l’impression d’être en vacances, dans cette maison, avec les beaux jours qui arrivent.
Vivement la fin du Covid, vivement le vaccin, qu’on puisse accueillir tous les amis ici. Et qu’on puisse faire connaissance avec les voisins, sans masque.
Sélim, ex-Parisien de la team fenêtres, nouveau dans la team jardins !
bonjour Sélim, j’ai adoré lire les raisons pour lesquelles tu as quitté Paris et je les partage. je te souhaite ainsi qu’à ta petite famille une bonne installation à la campagne afin de profiter de la vraie vie ! Se rapprocher de la nature, prendre le temps, et surtout faire découvrir toutes les belles choses que la nature nous offre à ta jolie petite fille !! je vous embrasse, Isabelle.
Bonsoir Isabelle !
Hâte de pouvoir tous vous recevoir ici (mais on a quelques travaux à faire d’abord !)
Des bises !
Salut Selim, ça fait un bail ! Je vois que tu as bien avancé dans la vie 🙂 J’ai quitté les Batignolles l’année dernière entre 2 confinements, pour la banlieue avec femme et fils de 2 ans maintenant. Ce n’est pas encore la zénitude campagnarde, mais calme et lumière sont plus agréables qu’un petit appart peu isolé au 1°! Surtout avec un bébé. Je partage un certain nombre de tes griefs : arrive un temps où Paris devient une meilleure maîtresse passagère qu’une compagne au quotidien. Tu vas t’installer où ?
C’est bon, j’ai vu que tu as trouvé la réponse tout seul !
C’était bien les Batignolles pour moi, entre 2008 et 2012 (après, on s’est fait éjecté de l’appart, le proprio voulait le récupérer pour un membre de sa famille)
Heureux de voir que toi aussi ça avance !
Je suis tombé par hasard sur votre article à la fois sincère, exact et nécessaire. Une lecture qui sera surement très utile pour la réflexion de beaucoup de personnes qui passeront ici. Merci!
Merci Marco ! Mais c’est bien le 18ème aussi, non ? 🙂
Avec le confinement on a tous appris qu’on était finement cons
Nous vivons dans un état providence et on aurait pu déjà exploré la France grâce aux APL
Mais nous voulions à tout prix rester à Paris et être propriétaires
Khadafi aussi avaient des résidences de luxe à Paris
Sélim, qu’est-ce que je te comprends ! Je me suis mise au vert aussi pour la naissance de notre 1ère fille Balkis il y a 7 ans. Depuis de l’encre a coulé sous les ponts mais je n’ai pas changé d’avis ! Peut-être qu’à l’occasion d’un futur masterclass pour nos anciens clients, nous pourrions t’inviter à parler de ton métier ? A voir !